Lors de la mise en ligne d’un blog, il est naturel de se poser un certain nombre de questions. Si beaucoup prennent le temps de définir la thématique qu’on souhaite aborder, nous sommes encore trop nombreux à négliger la question de l’identité sous laquelle nous désirons exercer nos talents de blogueur. Pourtant, ce choix n’est pas neutre et conditionnera la carrière du nouveau blog.
Même s’il n’est pas de règle absolue en la matière, c’est essentiellement l’objectif du blog qui devrait orienter le choix du blogueur : s’agit de partir à l’assaut du web pour obtenir un maximum de visites, auquel cas il nous faudra faire la preuve de nos compétences, et quel meilleur moyen de le faire que de dévoiler son identité. Au contraire, si notre ambition se limite – et c’est tout à fait honorable - à rassembler une communauté de fidèles pour le simple plaisir de se retrouver, ce que ma consœur Delphine appelle « bloguer à la roots», quelques lignes pour se décrire peuvent amplement suffire à satisfaire la curiosité du lecteur.
Examinons plus avant la situation du blogueur anonyme. On a beaucoup glosé sur les problèmes inhérents à l’utilisation des noms d’emprunt sur la toile : coupable de favoriser les attaques personnelles et le trollisme, l’anonymat serait source de tous les maux. Après tout, pourquoi faire attention à ce qu’on écrit quand on personne n’est là pour nous identifier ? Ce raisonnement est un peu court évidemment, et si l’on trouve beaucoup de médiocrité sur la toile, j’ai la faiblesse de croire qu’il n’y en a guère plus qu’au café du commerce. La seule différence est que Google n’est pas là pour mémoriser les discussions de comptoir.
Cette vision caricaturale est d’ailleurs battue en brèche par nombre de blogs remarquables dont l’auteur, soit pour cause d’incompatibilité avec le travail, de déontologie, de secret professionnel ou encore bien d’autres raisons tout-à-fait légitimes a préféré taire son nom. Il n’y a pas nécessairement de lien de cause à effet entre anonymat et blog au goût douteux, c’est pourquoi Pierre Assouline a raison de souligner sur son blog l’ambivalence d’un phénomène qui permet tout à la fois le pire, mais aussi le meilleur.
Si l’on peut se choisir un double numérique, l’alternative est évidemment l’utilisation de son véritable nom. Le dévoiler sera un atout s’il donne une certaine crédibilité à votre contenu. Il est évident que votre avis sera plus légitime si vous êtes un expert du domaine dont vous traitez, ce qui est typiquement le cas des journalistes et plus généralement des blogueurs qui évoquent leurs activités professionnelles. Faut-il le souligner, l’utilisation de son véritable nom se justifie d’autant plus que le blogueur en question jouit d’une certaine notoriété. Il est évident qu’il est plus facile pour Jaques Attali ou Jean Quatremer d’attirer des visiteurs sur leur seul nom que pour le blogueur lambda. Reste que certains ont tout de même réussi à bâtir leur propre réputation au départ du web, l’exemple de feu Versac, alias Nicolas Vanbremeersch, en est témoin.
Pourtant, bloguer sous son vrai nom emporte également un certain nombre de désagréments. S’il permet d’attirer plus facilement nos connaissances du monde physique, cela va aussi inexorablement nous amener à retrouver des gens qu’on n’avait pas forcément envie de revoir. S’ajoute à cela la crainte, quelquefois légitime, d’exposer ses opinions ou croyances au grand jour. Voila pourquoi, à côté de ces deux voies classiques, l’anonymat pur et simple et la revendication de son identité, certains préfèrent – à commencer par votre serviteur - une troisième possibilité. Comme le précise Mathieu de CeciDit, elle consiste à rester anonyme sans pour autant se cacher. Le but étant de marquer clairement la différence entre ce qui relève de la sphère privée et de la sphère publique.
Au terme de cette brève analyse, il est difficile de dire s’il préférable de bloguer sous un nom d’emprunt ou d’utiliser sa véritable identité. Et c’est tant mieux, car personne n’est mieux placé que vous pour répondre à cette question : une personne n’est pas l’autre. Pour ma part, je fais un pari : sauf à considérer le blogueur comme un être schizophrène, on est en droit de penser qu’il forme un tout, et que si sa personnalité dans le monde physique est quelque peu différente de celle qu’il exprime dans le monde virtuel, c’est parce qu’il y est soumis au contrôle social. Et si, loin de révéler la face la plus sombre de la nature humaine, l’anonymat qui est de mise sur la toile permettait au contraire à chacun de s’exprimer pleinement, en s’affranchissant des contraintes du monde physique. L’anonymat pour échapper au politiquement correct, en somme. Voilà qui éclaire d’un jour nouveau une notion trop souvent décriée, y compris par moi.
Qu’en pensez-vous ?
3 commentaires:
Il existe deux façons de s'afficher : en pleine page (comme sur Presse-Citron) ou timidement dans une page de crédits (dans ce cas il faut un nom de blog autre que son nom perso).
Ou bien encore prendre un faux nom, why not ?
Bel article en tous les cas
Très juste ce que tu dis.
Il faudra d'ailleurs que je songe sérieusement à réintégrer ma page "à propos" qui avait disparu suite à une fausse manipulation.
Merci pour ton commentaire.
A quoi bon ? Nos lecteurs ont-ils à ce point besoin de savoir quels sont nos livres, films et plats préparés préférés ? Ca leur apporte quoi que je leur fournisse un avatar ou ma tronche légérement retouchée pour être reconnu, mais pas trop (à moins que ce ne soit l'inverse) ?
Sinon moi aussi j'ai bien aimé ce texte =)
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