lundi 22 octobre 2007

Par le petit bout de la lorgnette

Je vous jure que j’ai essayé, mais devant la lame de fond qui semble s’être emparée des médias et de la blogosphère singulièrement, je ne peux que m’effacer. C’est lâche je sais, je ne fais que suivre un mouvement dont je ne suis pas à l’origine. Il faut croire que ce n’est pas à la portée de tous d’être résistant. Soit, je ferai mienne la phrase d’Oscar Wilde qui disait que « le meilleur moyen de résister à la tentation c’est d’y succomber. »

Me voilà contraint de sacrifier au désormais incontournable billet sur la très médiatisée lettre de Guy Môquet, celle que tout le monde a commenté, et que bien peu ont lu. J’aime autant vous prévenir tout de suite, je ne suis pas là pour vilipender Nicolas Sarkozy ni polémiquer à son sujet, d’autres ont fait, font et feront cela bien mieux que moi. Voilà, les présentations sont faites. Maintenant que la grande majorité de mon auditoire nous a quittés, nous pouvons commencer.

Beaucoup critiquent la lecture de la lettre en ce qu’elle ne dit rien du contexte dans lequel elle a été écrite et fait l’impasse sur l’engagement communiste de son auteur. Les communistes s’en offusquent, ils n’aiment pas qu’on passe à la trappe leurs derniers faits d’armes. Et il est vrai qu’une large part de la résistance est à mettre à leur actif. D’autres au contraire, comme Versac, ne peuvent s’empêcher, à juste titre me semble-t-il, de souligner la naïveté du portrait qui est brossé aujourd’hui de Guy Môquet. Je me range clairement dans cette seconde catégorie de l’opinion, rien n’est plus facile que de faire un héros de celui qui n’a jamais pu aller au bout de ses idées.

Je n’aime pas les symboles, je ne crois guère aux héros et les martyrs m’inspirent plus de méfiance que d’admiration. Surtout par les temps qui courent. Le monde ne sera certainement pas meilleur le jour où tout un chacun sera prêt à mourir pour les causes qu’il défend, mais au contraire quand plus personne n’acceptera de faire le sacrifice de son existence pour aucune cause que ce soit. Je rêve d’un monde dans lequel les gens ne seraient plus prêts à donner leur vie pour quoi que ce soit. Un monde dans lequel ni le nationalisme, ni les idées, encore moins la religion ne sauraient exiger le sacrifice de vies humaines.

Ce monde existe et il s’appelle démocratie. Associée à l’état de droit, elle implique qu’aucune cause ne justifie le sacrifice de qui que ce soit, sauf la défense de la démocratie et des principes qui en découlent.[1] La démocratie protège elle-même les plus faibles, donc nul besoin de se faire justice à soi-même. Nul besoin de prendre les armes pour se faire entendre.

Le combat de Guy Môquet, pour autant qu’il s’agisse bien de l’antinazisme, était légitime à l’époque. L’évoquer aujourd’hui comme un exemple à suivre avec des trémolos dans la voix n’a plus guère de sens aujourd’hui. Le contexte n’est plus le même. Il s’agit juste de garder bien à l’esprit que « le sommeil de la raison engendre des monstres », comme disait Goya. Mais cela, je n’ai jamais eu besoin d’aucune cérémonie pour en être conscient, et je veux croire que je ne suis pas le seul.

Je ne peux m’empêcher de trouver comme un paradoxe à s’indigner de l’agitation médiatique autour de cette lettre tout en y ajoutant sa pierre numérique (merci à Maître Eolas pour cette belle formule) par la publication de billets qui ne font pour la plupart que répéter ce que l’on savait déjà. Une fois de plus les contradicteurs de Sarkozy tiennent le haut du pavé. Cela deviendrait presque une profession de foi, c’est déjà un métier à part entière. A voir les remous suscités par ce qui ne dépassera jamais le stade de l’anecdote dans l’Histoire, je m’interroge. Pour un président omniscient, omniprésent, omnipotent, qui aurait la haute main sur les médias, j’ai rarement vu quelqu’un d’aussi contesté. On finirait presque par croire que la majorité des gens désapprouvent son action. Une question me vient à l’esprit : qui a élu Nicolas Sarkozy ?

Comme souvent, la palme de la meilleure analyse revient à Jules de Diner’s Room.

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[1] J’y inclus bien entendu les droits de l’Homme.

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