Donc, je serais un sale raciste. Je suis encore sous le choc, je viens de l’apprendre à l’instant. Tout ça parce que j’ai lu Tintin au Congo. Ce fut même l’une de mes premières lectures. Je n’ai pas le souvenir d’en être resté particulièrement choqué, ni que cela ait en quelque manière que ce soit influencé ma façon de percevoir les Africains. Personne ne m’a mis en garde contre le contenu de cet album il est vrai très peu politiquement correct, et pourtant je n’ai pas regardé par la suite toutes les personnes d’origine africaine avec condescendance. Pas de quoi fouetter un chat, selon moi. Ce n’est pas l’avis du Conseil représentatif des associations noires de France qui juge "offensant" la bande dessinée « Tintin au Congo ». Il demande aux éditions Casterman de retirer l’ouvrage.
Je reste perplexe. Fondamentalement, ce que méconnait cette demande, c’est toute la notion de contexte. On ne peut pas juger des actions des hommes sans tenir compte du contexte qui les a vus naitre. Condamner l’œuvre d’Hergé, c’est un peu comme dire que César est un criminel de guerre parce qu’il s’est livré à un véritable génocide lors de la conquête de la Gaule. Il faut se garder de tout anachronisme et analyser ses actes à l’aune de ce qu’on pourrait appeler la « cruauté moyenne de l’époque.[1] » Je serais bien incapable de me prononcer sur le fait de savoir si le chef romain était plus cruel que la norme de l’époque, donc je me garderai bien de porter un jugement définitif sur la question. Même si certaines pratiques de l’époque nous paraissent, à nous autres héritiers du Siècle des Lumières, barbares[2], il n’en reste pas moins qu’à l’époque elles étaient socialement parfaitement acceptables. Quand César tue des captifs après la victoire, il ne se comporte vraisemblablement pas de manière pire que la moyenne de ses contemporains. Bien plus, tout geste de clémence aurait vraisemblablement été interprété comme une forme de faiblesse.
Il est un fait certain que cet album n’est pas le meilleur d’Hergé, c’est même à mon sens le moins bon. Pas de scénario, un Tintin paternaliste, guère sympathique et bien peu soucieux de l’environnement, c’est le moins que l’on puisse dire. Bilan peu reluisant, il est vrai. On aurait cependant tort de condamner Hergé et son œuvre de jeunesse pour l’exemple, juste parce qu’il n’a pas su s’écarter de la pensée dominante de son époque. Du reste, les exemples de ce qu’Hergé n’était pas raciste sont aussi nombreux que ceux qui accréditent cette hypothèse. Tchang en est un bon exemple, mais il n’est pas le seul. Pour ceux qui savent lire entre les lignes, ou plutôt les phylactères.
[1] Quelle horrible formule.
[2] Je crois que les Romains n’auraient pas aimé du tout ce mot ainsi utilisé pour qualifier leurs pratique.
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