Il est difficile d’écrire sur un thème que l’on connaît peu. J’ignorais à peu près tout de Facebook jusqu’à ce que je me rende compte que la majorité de mes contacts y était inscrit. Beaucoup s’y jettent en effet corps et biens, sans être nécessairement conscients des conséquences de leur adhésion. Pourtant, Facebook pose de nombreuses questions, tant au niveau de son mode de fonctionnement que de l’utilisation des utilisateurs.
Pourquoi Facebook ?
Facebook est l’illustration par excellence de ce paradoxe propre au XXIème siècle : on ne connaît plus son voisin, mais on n’hésite pas à balancer sur la toile des informations parfois très personnelles : amis, convictions politiques, religieuses… A croire que la distance induite par l’utilisation de l’ordinateur favorise les rapprochements.
Ce phénomène pourrait se comprendre dans le cadre de l’utilisation courante de l’internet. Après tout, l’anonymat qui y règne de par l’utilisation d’un pseudonyme permet de parler de soi avec une certaine liberté sans crainte des conséquences. Ce n’est pas le cas avec Facebook dont le principe veut justement que chacun apparaisse sous sa véritable identité. Cette condition remplie, on pourra se constituer son réseau et retrouver toutes les anciennes connaissances qu’on avait perdues de vue, volontairement ou non. Et puis il y a les autres, l’immense majorité qu’on ne connait pas dans le monde physique qui vous tend ici les bras. Par une curieuse ironie du sort, l’ensemble forme vos « contacts », quand bien même vous ne communiquez réellement qu’avec une infime partie d’entre eux.
En général, l’étape d’après consiste à rejoindre différentes communautés suivant vos affinités : les fans d’un groupe de rock, du même politicien ou que sais-je. Ensuite, à vous les tests futiles du style : « Quelle pétasse êtes-vous ? » L’intelligence n’en sort pas forcément grandie, mais après tout cela ne me concerne pas. Plus problématique est la question du mode de financement de Facebook. Le célèbre réseau social tire ses revenus des publicités ciblées qui s’affichent sur l’écran des utilisateurs et sont ciblées en fonctions des informations de leur profil. Rien de neuf, Google fonctionne de la même manière (voyez le test) ; à ceci près qu’il est loin de collecter des données aussi sensibles.
Comment ça marche ?
Facebook est donc une véritable mine d’or pour les annonceurs, puisqu’il leur permet d’adresser leurs publicités exactement au public cible, celui qui est le plus susceptible d’acheter le produit vanté. Un menu service qui sera évidemment facturé aux annonceurs au prix fort. Le problème est qu’aujourd’hui nous n’avons aucune garantie quant à l’utilisation des données stockées sur Facebook. En témoignent, les conditions d’utilisation qui comprennent les dispositions suivantes :
« En publiant un Contenu utilisateur sur le Site, vous autorisez expressément la Société à créer les copies nécessaires pour faciliter la publication et le stockage du Contenu utilisateur sur le Site. En publiant un Contenu utilisateur sur tout ou partie du Site, vous concédez expressément à la Société, et vous garantissez détenir les droits nécessaires à cet effet, une licence irrévocable, perpétuelle, non exclusive, transférable et pour le monde entier sans rétribution financière de sa part (y compris le droit de concéder des sous-licences), d'utiliser, copier, représenter, diffuser, reformater, traduire, extraire (en tout ou partie) et distribuer ce Contenu utilisateur, à des fins commerciales, publicitaires ou autres, sur le Site ou en relation avec le Site. »
Le danger vient de Facebook lui-même, mais pas seulement. Au Etats-Unis, dans plusieurs affaires de roulage, le ministère public s’est servi du réseau social pour recueillir des informations accablantes pour l’accusé. En France, même si la question ne s’est pas encore posée, Maître Eolas, avocat et blogueur, estime que la même possibilité est ouverte au autorités. Face à cette menace aux contours mal définis, la riposte s’organise. Au Canada, plainte a été déposée contre Facebook pour violation de la vie privée. Chez nous, des voix s’élèvent pour dénoncer la fausse gratuité des réseaux sociaux. D’une manière ou d’une autre, que ce soit via la publicité ou directement, il y a toujours quelqu’un qui finance le service.
Il n’y a pas de repas gratuit, dit le vieil adage, qui peut tout aussi bien s’appliquer au Web 2.0. Il semblerait que, pour s’offrir cette illusion, nombre d’internautes soient prêts à vendre leurs informations à une société qui semble décidée à marcher dans les pas de Google, jusque dans ses contradictions.
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