dimanche 3 février 2008

Histoire(s) secrète(s)

Oubliez tout ce que vous croyiez savoir sur le monde de l’espionnage, c’est à la véritable naissance de la Cia que nous convie Robert de Niro dans son dernier film, Raisons d’Etat (The Good Shepherd) qui vient de sortir en dvd. Avec pour toile de fond la lutte en coulisses que se livrent les agents de la Cia et du Kgb, le film raconte l’ascension d’Edward Wilson, étudiant de bonne famille, au sein de la plus connue des agences de renseignement. Sa discrétion et sa loyauté en feront rapidement un excellent élément, mais ses activités l’obligeront également à transiger avec ses principes quand les circonstances l’imposent. Aussi, le film n’évite-t-il pas les questions qui fâchent, notamment sur les méthodes quelquefois discutables utilisées pour assurer la sécurité du pays.

Loin de n’être qu’une fresque historique sur les débuts d’une puissante agence gouvernementale, le film traite aussi de thématiques que les événements du 11 septembre 2001 ont replacées en pleine lumière. Certaines scènes du film rappellent des situations bien réelles. Ainsi, la séquence de l’interrogatoire illustre bien le fait que les techniques d’interrogatoire que l’administration Bush qualifie pudiquement d’ « agressifs » ne datent pas d’hier, en particulier le simulacre de noyade, encore utilisé actuellement, notamment en Irak.

Même s’ils opèrent dans l’ombre, les agents de renseignement n’en restent pas moins des hommes. Ils exercent un métier exaltant certes, qui leur confère le privilège d’écrire l’Histoire, mais à quel prix ? Le mépris de sa propre sécurité et de celle de ses proches, et puis une absence quasi-totale de vie de famille. Jusqu’où ces hommes sont-ils prêts à aller pour servir leur pays ? Au fond la morale du film pourrait être la suivante : La liberté n’a pas de prix mais elle a un coût. Bien peu sont prêts à le payer. J’ignore qui est le plus à blâmer de celui qui accepte de se salir les mains pour défendre ce en quoi il croit ou de celui qui tire tout autant profit de la situation mais détourne le regard devant les procédés utilisés pour y parvenir.

Imaginons qu’un homme ait planqué une bombe au cœur d’une grande ville et que vous savez que cette bombe explosera dans les la prochaine heure. Impossible d’évacuer tout le monde. Que faire ? Faut-il fermer les yeux sur les principes et utiliser tous les moyens disponibles pour que le terroriste révèle l’emplacement de la bombe. Faut-il au contraire s’en tenir aux interrogatoires « classiques, » au risque d’arriver trop tard ? La vérité, c’est qu’il n’y a que des mauvaises réponses et que les autorités seront de toutes manières critiquées, quelle qu’ai été leur action. La torture est inacceptable en principe. L’est-elle en toute circonstance ? L’admettre, c’est reconnaître implicitement l’idée que l’on sacrifie des innocents et je peux difficilement m’y résoudre. Pourtant, la perspective de sacrifier ses principes ne me paraît guère plus engageante.

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